Le cadre de la procédure d’injonction de payer
Qu’est-ce qu’une injonction de payer ?
La procédure d’injonction de payer est une procédure simplifiée qui permet à tout créancier d’une somme d’argent, d’obtenir rapidement et facilement la condamnation de son débiteur en paiement, par une décision du tribunal. Cette procédure est donc très utilisée dans le cadre du recouvrement de créances, tant par les Huissiers eux-mêmes que par les sociétés de recouvrement pour le compte de leurs clients.
Définie par les articles 1405 et suivants du code de procédure civile, la procédure est identique quelle que soit la juridiction devant laquelle elle est engagée (Président du Tribunal de Commerce, Juge des contentieux de la protection et Président du Tribunal Judiciaire).
Cette procédure, d’ailleurs, n’a quasiment pas été modifiée depuis sa création par un décret de 1981 et entré en vigueur en 1982. Il s’agit et de loin de la procédure la plus utilisée en droit français pour obtenir la condamnation d’un débiteur ou d’un client en retard, surtout dans le cadre du recouvrement d’une facture impayée.
Quand entamer une procédure d’injonction de payer ?
La procédure d’injonction de payer intervient traditionnellement à l’issue d’une phase de recouvrement amiable, après l’envoi d’une lettre de mise en demeure. Lorsque l’envoi d’une lettre de relance ou un appel téléphonique ne suffisent pas à obtenir du client le paiement de sa dette, il devient alors nécessaire de sécuriser la dette par une action judiciaire.
Comment obtenir une injonction de payer ?
La procédure d’injonction de payer est une procédure civile juridictionnelle, elle est soumise à l’appréciation d’un juge, mais non contradictoire. Cela signifie que les parties ne sont pas convoquées à une audience, le juge qui sera saisi du dossier va examiner la demande sur les pièces qui lui auront été communiquées à l’appui de la requête.
Le choix du tribunal va varier en fonction de la qualité des parties, ou en fonction de la nature des créances réclamées.
- Entre deux commerçants (qu’ils exercent en nom personnel ou dans le cadre d’une entreprise, SARL, SAS ou même SNC…), la compétence relève exclusivement du Président du Tribunal de commerce.
- En matière de crédit bancaire ou de loyers impayés, c’est le juge du contentieux de la protection qui se sera seul compétent.
- Dans tous les autres cas, c’est auprès du Président du tribunal judiciaire (le tribunal judiciaire remplace le tribunal d’instance et le tribunal de grande instance depuis le 1er janvier 2020) qu’il faudra déposer sa requête.
Les 4 grandes étapes d’une procédure d’injonction de payer
1. Le déclenchement de la procédure : le dépôt de la requête en injonction de payer
La procédure d’injonction de payer est engagée par le dépôt d’une requête. Il suffit d’adresser au greffe du tribunal compétent une requête en injonction de payer. Dressée sur papier libre ou sur un bordereau cerfa disponible en téléchargement sur Internet, la requête reprend succinctement le contexte du litige.
Elle détaille le montant de la créance poste par poste et ligne par ligne : principal, intérêts, pénalités et frais. Elle demande au juge de condamner le client au paiement des créances impayées.
La requête est accompagnée des pièces justificatives de la créance : contrat, devis, facture, courriers de relance ou lettre de mise en demeure.
Le dépôt de la requête est possible en ligne sur la plateforme www.infogreffe.fr, qui vous guide tout au long du processus de création du dossier d’injonction de payer, vous pouvez également télécharger sur la plateforme les pièces justificatives de la créance.
Malheureusement, seul le dépôt de la requête est possible, et l’on peut attendre à l’avenir qu’il soit possible de télécharger en ligne l’ordonnance rendue par le Président du Tribunal de Commerce.
Quelle que soit la nature de la juridiction compétente, la procédure applicable sera la même, telle qu’elle est définie par le code de procédure civile dans ses articles 1405 et suivants.
La requête, si elle est complète et accompagnée des pièces justifiant la créance, sera examinée par le juge. Aucun délai n’est cependant imposé au juge. Vous devez donc être vigilant, notamment si la créance concernée est ancienne, puisque ni le dépôt de la requête ni l’ordonnance qui sera rendue par la suite ne vont avoir pour effet de suspendre la prescription de la créance. C’est en effet la date de la signification de l’ordonnance par un acte d’Huissier de Justice qui va finalement interrompre la prescription.
2. L’ordonnance portant injonction de payer rendue par le juge
Une fois la requête et les pièces examinées, le juge rendra une ordonnance. L’ordonnance peut accepter totalement ou partiellement la demande de condamnation en paiement. On parle alors d’une ordonnance d’injonction de payer.
Si l’ordonnance refuse la demande, il s’agit alors d’une ordonnance de rejet.
Ni l’une ni l’autre ne doivent nécessairement être motivées par le juge. Il est cependant fréquent que ce dernier explique en quelques mots les motifs de sa décision, ce qui permet d’orienter le créancier sur les suites à donner, notamment s’il est invité à introduire une instance au fond.
L’ordonnance d’injonction de payer, quel que soit le tribunal qui l’a rendue, doit être signifiée dans les six mois de son prononcé. Au-delà de ce délai de six mois, elle est frappée de forclusion. La forclusion est un mécanisme de péremption pour l’ordonnance qui est réputée n’avoir jamais existé. Seule la signification de l’ordonnance d’injonction de payer par acte d’Huissier de Justice va pouvoir suspendre la prescription de la dette. Ni la requête ni l’ordonnance n’ont cet effet.
3. La signification de l’ordonnance portant injonction de payer
Pour être valable et ne pas risquer la forclusion, l’ordonnance d’injonction de payer doit être signifiée au débiteur dans les six mois de son prononcé. L’Huissier de Justice en charge de la signification va tout faire pour la remettre à la personne même du débiteur (ou à une personne habilitée s’il s’agit d’une entreprise) afin de lui indiquer précisément les modalités de contestation de l’ordonnance.
La signification de l’ordonnance d’injonction de payer doit nécessairement être effectuée par un acte d’Huissier. Cet acte qui s’accompagne d’une copie de l’ordonnance ouvre un délai d’un mois pour que le débiteur puisse formuler directement auprès du juge, une contestation sur l’ordonnance prononcée contre lui ou sur la créance qu’elle consacre. La contestation est alors examinée en audience, par le juge qui a rendu l’ordonnance et en présence des parties, éventuellement représentées par leur avocat.
4. L’ordonnance d’injonction de payer exécutoire
Sans contestation du débiteur dans le mois qui suit la date de signification de l’ordonnance par un acte d’Huissier, l’ordonnance d’injonction de payer est retournée au greffe du tribunal par le créancier ou son mandataire.
Le greffier va alors apposer à la fin de l’ordonnance la « formule exécutoire ».
La formule exécutoire est un petit texte qui donne à l’ordonnance la force d’un titre exécutoire, la même valeur qu’un jugement.
Le titre exécutoire permet ensuite au créancier, dans le cadre de son recouvrement judiciaire, d’engager des procédures d’exécution forcée (saisie sur les meubles, les comptes bancaires ou encore les salaires).
L’opposition à injonction de payer
Le débiteur qui a des contestations à formuler (sur la créance, sur les sommes dues et même sur le contrat) a le droit de former opposition.
L’opposition est matérialisée par une lettre envoyée ou déposée au greffe du tribunal qui a rendu l’ordonnance.
En cas d’opposition (régulièrement formulée), l’ordonnance sera anéantie et les parties seront convoquées à une audience (elles devront même constituer avocat si le montant de leur affaire dépasse les 10 000 euros) où elles devront s’expliquer sur leur dossier.
Lors de cette audience, après avoir entendu les parties, le juge rendra un jugement, et cette nouvelle décision de justice viendra se substituer à l’ordonnance.
La procédure d’injonction de payer est plébiscitée car les intérêts qu’elle présente sont multiples :
- La procédure est plus rapide (entre 2 et 5 mois selon les tribunaux)
- La représentation par avocat n’est pas obligatoire
- La procédure coute moins cher
- Au final, l’ordonnance produit les mêmes effets qu’un jugement.